Êtes-vous doués avec les technologies?
Je l’ai déjà écrit, je ne veux pas savoir comment ça fonctionne; je veux simplement que ça fonctionne. Mais la vie nous met souvent à l’épreuve. C’est ce qui m’est arrivé l’autre soir. Alors que j’étais en visite au CHSLD…
J’ai salué madame Cormier comme à l’habitude. Assise au bout de son lit, dans le silence le plus total, elle semblait dépitée. J’ai rapidement su pourquoi.
«Ma télé ne fonctionne plus depuis quelques jours. Je ne sais pas ce qui va m’arriver. J’ai 90 ans, je ne peux pas vivre sans», m’a-elle avoué, m’arrachant le cœur.
Madame Cormier vit en permanence dans sa chambre. Sa télé, c’est toute sa vie, tout ce qui lui reste. De jour comme de soir, sa Toshiba est allumée à tue-tête «au 10». C’est elle qui lui tient compagnie, la sort de sa solitude, lui permet de garder un contact avec le monde extérieur. Sans sa télé, madame Cormier n’existe pas. Elle est éteinte comme l’appareil.
J’ai arrêté net mon chemin.Surtout que je me suis engagée récemment envers moi-même à plus de bienveillance envers les plus vulnérables de notre société.
«La bienveillance est sur le chemin du devoir.»
-Mencius
J’ai commencé à jouer avec les fils derrière son téléviseur et son décodeur.
«Oh! Mon dieu! Travaillez-vous à Hydro-Québec?, m’a-t-elle demandé au bout de quelques instants. Vous avez l’air de vous y connaître.»
Je riais et discutais avec elle tout en faisant des tentatives.
«Vous êtes vraiment patiente, m’a-t-elle lancé au bout d’un moment. Moi j’aurais peur de m’électrocuter. Vous devriez aller travailler à Hydro-Québec si vous perdez votre emploi! Vous êtes bonne.»
Je riais de plus belle.
Croyez-le ou non, au bout d’une demi-heure environ, j’ai finalement réussi à régler son problème. À son plus grand soulagement.
«Mais qu’est-ce que je peux bien vous donner pour vous remercier? Je n’ai pas d’argent», m’a-t-elle dit.
Des remerciements étaient insuffisants pour elle. Je suis repartie avec un petit tricot aimanté d’un chat. Qui me fera toujours penser à la télé de madame Cormier.