J’en avais glissé un mot il y a deux semaines, en risquant une prédiction qui n’était pas vraiment téméraire, et elle se révèle malheureusement plus juste que je ne l’aurais souhaité: l’inflation atteint des sommets au pays.
Le bilan que vient de présenter Statistique Canada est implacable. En décembre, l’indice des prix à la consommation affichait une hausse de 4,8% sur une base annuelle. C’est l’augmentation la plus importante en 30 ans, depuis décembre 1991. En passant, c’est l’année où la Banque du Canada a officiellement établi sa cible d’inflation maximale à 2%. Elle est demeurée dans ce cadre durant toutes ces années… jusqu’en 2021. Depuis, c’est la cavalcade.
C’est dire que la Banque du Canada est à deux doigts d’enclencher l’ascenseur et de faire grimper les taux d’intérêt. Les institutions financières vont suivre. En principe, quand le crédit commence à coûter plus cher, les emprunteurs deviennent plus prudents. Avec moins d’argent en circulation, la consommation ralentit. Une baisse de la demande peut aider à circonscrire la hausse des prix. C’est précisément une application de la loi de l’offre et de la demande.
Évidemment, cette nouvelle dynamique ne survient pas instantanément. C’est pourquoi il faut habituellement plusieurs coups de semonce, donc plusieurs hausses de taux d’intérêt, pour qu’elle finisse par s’installer.
On s’attend donc à ce que la Banque du Canada augmente trois ou quatre fois cette année son taux de base. C’est pratiquement inévitable, à moins que…
À moins qu’un petit indice caché dans l’analyse de Statistique Canada permette d’entrevoir un autre scénario.
Oui, sur 12 mois, l’inflation a monté pour atteindre 4,8 %. Mais de novembre à décembre, elle a baissé de 0,1 %. Qui plus est, c’est en bonne partie la poussée récente des prix de l’essence qui a contribué à mousser l’inflation. Si ces prix se stabilisent, ou déclinent, son élan déclinera également.
Autrement dit, ce n’est pas une fatalité.
Mais étant donné le niveau d’endettement moyen des Canadiens, mieux vaut ne pas prendre de risques et veiller à ne pas l’alourdir.
Aux dernières nouvelles, il se situait à 172% du revenu disponible. C’est la proportion la plus importante de tous les pays industrialisés. En termes simples, un ménage qui peut compter sur un revenu de 100 000$ après toutes les ponctions (impôt, taxes, contributions de toutes sortes) doit, en moyenne 172 000$.
Quand on paie peu en intérêt, ça peut toujours aller. Mais il se peut maintenant que la facture augmente. De là le danger.
On en saura plus dans quelques jours. Il est question d’une première hausse d’ici la fin janvier. Il faudra alors interpréter le message qui accompagnera la décision de la Banque du Canada. Croisons-nous les doigts…