Avoir deux mamans

le mercredi 4 mai 2016

Contrairement à la majorité de ses camarades de classe, Mathis confectionne deux bricolages à la fête des Mères: un pour maman et un pour maman Chantal.

«Plus jeune, Alexandra faisait plutôt un bricolage pour moi à la fête des Mères et, à la fête des Pères, elle en faisait un pour Chantal», indique Janick Korb qui a porté ses deux enfants.

«Tout le monde le savait que j’avais deux mères et ça ne posait pas de problème à personne, précise l’adolescente de 16 ans. Mais c’était juste moins long de faire un bricolage!» admet-elle en riant.  

Chantal Falcon affirme que le couple n’a jamais rien imposé à ses enfants; ni pour les bricolages ni pour le diminutif affectueux qu’ils choisiraient.

«Ils nous ont appelés maman et maman Chantal sans qu’on en ait discuté et c’est parfait ainsi», dit-elle.  

Mathis, qui écoutait l’entrevue d’une oreille tout en jouant à un jeu vidéo, dit ne jamais avoir posé de questions par rapport à sa situation familiale hors du commun.

«Je ne m’en suis jamais fait poser à l’école non plus, fait savoir l’enfant de 9 ans. Pour moi, c’était normal.» 

De nombreux questionnements

En couple depuis 21 ans, Chantal et Janick ont amorcé les démarches pour avoir un premier enfant après cinq ans de vie commune.

«On s’est posé des questions sur l’aspect légal – qu’est-ce qui arrive si une de nous deux meurt? – mais on s’est aussi questionnées sur un paquet d’autres affaires. Qu’est-ce que les gens vont dire? Comment nos enfants vont réagir? Est-ce qu’ils vont être traités différemment à l’école à cause de nous?»

Après de nombreuses discussions, les deux femmes mariées ont décidé qu’il valait le coup d’essayer. Elles n’ont jamais regretté leur choix.

Pour obtenir le titre de parent sur l’acte de naissance d’Alexandra, Chantal Falcon a dû l’adopter. Grâce aux changements législatifs, la situation a été différente pour Mathis et le nom des deux parents a été inscrit sur son baptistère dès sa naissance.

Les défis

Si Chantal et Janick sont toutes deux reconnues comme parent, la réalité demeure tout autre quand vient le temps de remplir un formulaire.

«Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai dû biffer père pour le remplacer par mère ou parent no 2, indique Mme Falcon. Même si nos enfants fréquentent les mêmes écoles depuis longtemps, les formulaires de commission scolaire ne sont toujours pas changés et c’est pareil pour de nombreux documents officiels.»

Trouvant cette situation irritante au début, les deux femmes ont abdiqué et ont choisi de mettre leurs énergies ailleurs.

À ceux qui croient que les enfants souffrent de l’absence d’une présence masculine, le couple répond que de nombreux hommes gravitant dans l’entourage ou la famille servent de modèles aux enfants. Pour ce qui est de l’orientation sexuelle de leur progéniture, les deux mères affirment que le modèle familial n’a pas d’incidence. Les études menées sur le sujet vont également dans ce sens.

«Nos parents respectifs étaient hétéros et Chantal et moi n’avons pas reproduit ce modèle, indique Mme Korb. Je ne vois pas pourquoi ce serait différent pour nos enfants.»

Respect

Le couple confie ne jamais avoir forcé la main à qui que ce soit. Les deux femmes respectent le rythme d’acceptation de chacun et répondent aux questions lorsqu’il y en a.

«Comme catholiques, on voulait faire baptiser nos enfants, raconte Mme Falcon. On est allé voir le curé et on lui a expliqué notre situation en lui indiquant que c’était important pour nous qu’il soit d’accord. Il a accepté et tout s’est fait dans le respect.»

«On a toujours respecté les autres là-dedans et je pense que ça nous revient», conclut Mme Korb.

 

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