Après 65 ans à accompagner les citoyens dans la confection de bijoux qui leur tiennent à cœur, la bijouterie Guy Serres, à La Prairie, fermera ses portes à la fin décembre. Étant donné que la relève n’est pas au rendez-vous, Nathalie Serres a décidé de fermer les livres et ainsi préserver l’héritage de son père.
L’industrie des bijoux a beaucoup changé depuis 1958. Que ce soit sur le plan des modèles ou des canaux de ventes, plusieurs aspects ont évolué selon la propriétaire.
«C’est certain qu’au début de l’existence de la bijouterie, il y avait moins de choix de modèles et moins de compétition, explique Mme Serres. Aujourd’hui avec Internet, les choix sont infinis. Comme dans la mode, les gens veulent du changement, alors ils gardent leurs bijoux moins longtemps.»
La clé du succès de la boutique familiale réside dans la confiance des clients, selon elle.
«Les clients autrefois étaient moins exigeants et se fiaient à leur bijoutier, ajoute-t-elle. Ils étaient fidèles et voulaient que leurs bijoux durent longtemps. La confiance et le service étaient importants pour réussir.»
De nos jours, les clients se fient beaucoup aux marques pour influencer leur choix ainsi qu’au réseau social Instagram pour leur donner des idées, affirme la propriétaire.
«Les clients prennent plus d’informations sur le Web avant de venir nous voir, poursuit-elle. Par exemple, lorsqu’ils achètent des montres, ils sont au courant des caractéristiques de celles-ci alors qu’avant, ils se fiaient au vendeur.»
Cependant, elle déplore le service avec les fournisseurs qui a changé au fil des années.
«C’est très difficile d’avoir des pièces, surtout pour les montres, estime-t-elle. Il faut les suivre et faire des suivis, car ils ne nous tiennent pas au courant lorsqu’il y a des produits ou pièces discontinués ou en commande pour eux.»
Souvenirs
La famille Serres garde de beaux souvenirs depuis l’ouverture de sa boutique en 1958. Guy Serres adorait modifier des bijoux pour les transformer en modèle unique. Celui qui se définit comme un perfectionniste était un passionné avant tout.
«Il m’arrivait parfois que des clients me demandent de réparer leurs bijoux et je ne comptais pas les heures tellement je m’amusais», se réjouit-il.
D’ailleurs, il savait que certains clients disaient des balivernes lorsqu’ils réclamaient une réparation sous prétexte d’un défaut de fabrication, mais cela ne le dérangeait pas. Il entretenait des liens forts avec sa clientèle, qui venait de génération en génération.
«J’aimais voir les enfants des clients que j’avais servis autrefois, décrit le bijoutier de 88 ans. C’est beau de voir qu’ils ont continué à venir ici.»
Sa plus grande réalisation?
«Mes enfants et mes petits-enfants», dit-il avec un grand sourire.
Quant à Mme Serres, elle est fière d’avoir été la première sur la Rive-Sud à vendre les grandes marques telles que Pandora, avance-t-elle.
«Je suis allée à Las Vegas et j’ai vu le potentiel du produit, explique-t-elle. Ils avaient un tout petit kiosque et à cette époque, les bijouteries n’avaient pas de marques sauf pour les montres.»
Elle chérit les moments passés avec son père dans ses débuts.
«Lorsque j’allais à Toronto avec mon père pour faire les achats au début de ma carrière, c’était un moment où je passais du temps seule avec lui. Il me transférait ses connaissances, surtout sur la fabrication. J’ai beaucoup appris.»