Une Talbot-Lago T150-C-SS 1937 carrossée par Figoni & Falaschi, une des automobiles les plus belles de l’histoire, a été vendue à un prix record lors l’encan organisé par Gooding & Company à Amelia Island, en Floride. Cette pièce de collection qu’on surnomme la « goutte d’eau » a trouvé preneur pour la somme de 13 425 000 $US. Du coup, elle est devenue l’automobile française ayant atteint le prix le plus élevé lors d’une vente aux enchères, selon l’entreprise californienne.
La marque française Talbot-Lago a vu le jour au milieu des années 30 lorsque l’ingénieur et homme d’affaires d’origine italienne Anthony Lago prend le contrôle des Automobiles Talbot S.A., un constructeur moribond établi à Suresnes, en banlieue de Paris.
Il lance alors une petite gamme de voitures comprenant, entre autres, la T150-C-SS, son porte-étendard qu’il dévoile au Salon de Paris, en 1936. Variante de la T-150-C, une voiture de course destinée au Grand Prix de France, la SS (pour Super Sports) partage son 6-cylindres-en-ligne de 4,0 L. Ce moteur de 140 ch est jumelé à une boîte de vitesses Wilson à présélecteur et 4 rapports. Puissante pour l’époque, cette voiture a quatre freins à tambour et une suspension indépendante à l’avant.
Une voiture pour les bien nantis
Talbot-Lago vend le châssis nu de cette voiture à ses acheteurs pour la coquette somme de 78 000 francs avant de l’acheminer chez les plus grands carrossiers du temps. À la même époque, une Citroën Traction 7C, une berline populaire, est vendue 18 000 francs — complète !
Les historiens affirment que l’atelier parisien de Figoni & Falaschi aurait doté 13 T150-C-SS d’une carrosserie « goutte d’eau », un design proposé en deux versions. Trois SS ont reçu le design Jeancart caractérisé par la forme trapue de sa partie arrière. Les dix autres ont une carrosserie tout aluminium plus élancée de style New York, du nom du Salon de l’auto américain où elle avait été dévoilée.
Propriété de playboy ou cadeau de princesse ?
La voiture vendue à Amelia Island a le châssis numéro 90107. Elle se distingue des autres par sa carrosserie entièrement carénée. Selon Gooding, cette voiture serait une des quatre « gouttes d’eau » commandées par l’Australien Freddy McEvoy (1907-1951), un célèbre playboy, bobeur olympique et pilote de course de l’époque. La voiture a cependant été enregistrée au nom d’un certain André David. Or, Gooding ne précise pas s’il s’agissait du compositeur français du même nom.
En outre, selon certaines archives, cette superbe Talbot aurait été le cadeau de mariage offert à la danseuse de cabaret britannique Stella Mudge par le prince héritier du royaume de Kapurthala au Punjab, Paramjit Singh. Là aussi, Gooding ne confirme pas les faits.
En revanche, on sait que la femme qui deviendra la princesse Stella de Kapurthala a bel et bien présenté cette Talbot-Lago au Concours d’élégance Fémina présenté au Trocadéro à Paris, en 1938. Des photos la montre vêtue d’une robe élégante aux côtés de la voiture, selon la tradition des concours d’élégance d’alors. La Talbot-Lago avait même remporté le prix Excellence lors de cet événement.
Exportée très tôt aux États-Unis
L’année suivante, la voiture est vendue à un Californien fortuné nommé Thomas Stewart; un pionnier de la télévision qui a installé le premier émetteur à Los Angeles, en 1931. Dès lors, cette « goutte d’eau » entre aux États-Unis pour y rester. Stewart l’a conservé jusqu’à sa mort, en 1950. Par la suite, six autres Étatsuniens se la partageront, dont le plus récent qui demeure anonyme.
Photos : Gooding & Company / Mathieu Heurtault et Jensen Sutta
Le texte Encan Gooding d’Amelia Island : plus de 13 millions $ pour une « goutte d’eau » provient de L’annuel de l’automobile – Actualité automobile