Un ex-médecin de l’hôpital Anna-Laberge visé par une plainte

le lundi 23 juillet 2018

Une résidente de Saint-Rémi demande au Collège des médecins d’enquêter sur les agissements de l’urgentologue qui l’a prise en charge à l’hôpital Anna-Laberge à Châteauguay à la suite d’un violent accident de la route en 2013 à Saint-Constant.
Dans la nuit du 21 décembre 2013, Caroline Gauvin a percuté un tracteur de ferme équipé d’une souffleuse qui circulait en sens inverse sur la montée Saint-Régis. Le véhicule empiétait dans la voie où elle roulait. Des pinces de désincarcération ont été nécessaires pour l’extirper du véhicule.
Selon la plainte, elle a été admise à l’hôpital à 3h42 où elle a subi un prélèvement de sang pour fins d’analyses médicales ainsi que des radiographies. Le médecin lui a également prescrit du Fentanyl.
Deux heures après son hospitalisation, le policier sur place a demandé qu’un autre échantillon de son sang soit fourni afin de déterminer son alcoolémie. Les agents qui étaient intervenus traitaient ainsi l’affaire comme un accident provoqué par une conduite avec les capacités affaiblies, rapporte la plainte.
«L’urgentologue a signé un certificat de médecin qualifié, attestant qu’à son avis, elle était capable de donner son consentement libre et éclairé audit prélèvement, y consentait que cela ne mettait pas sa vie ou sa santé en danger», est-il écrit dans la demande d’enquête.
Le prélèvement a été effectué et a décelé un taux plus élevé que la limite permise.
Pour l’avocat de la plaignante, Me Damien Pellerin, il ne fait aucun doute que sa cliente n’était pas en mesure de donner un tel consentement.
«Mme Gauvin n’était pas en état de consentir, étant donné que ses capacités cérébrales ont été affectées par l’accident, en plus de la prise de Fentanyl qui lui a été administrée. Elle n’était pas en état de comprendre ce qui se passait», a-t-il soutenu au Reflet.
D’après son dossier médical, Caroline Gauvin a notamment subi quatre traumatismes cervicaux ainsi qu’une amnésie des circonstances de l’accident.
«Est-ce qu’un patient, entre la vie et la mort, est en mesure de comprendre et saisir la portée d’un échantillon de sang pour fins d’enquêtes criminelles?» questionne la partie plaignante dans le document.
Me Pellerin estime que sa cliente aurait dû bénéficier de la présence d’un avocat à ce moment.
«Je ne vois pas en quoi c’était utile à la santé de la patiente de faire des échantillons pour l’enquête, dit-il. Le médecin n’avait pas à s’immiscer là-dans, puisque ce n’était pas d’intérêt médical.»
Transfert à Sacré-Cœur
Après trois heures d’hospitalisation à Anna-Laberge, la victime a été transférée à l’hôpital Sacré-Cœur à Montréal où elle a été opérée.
Selon Me Pellerin, le transfert aurait dû se faire plus rapidement, puisqu’il s’agit du seul centre hospitalier du Québec à traiter les personnes blessées à la moelle épinière, comme Caroline Gauvin.
«En prenant l’échantillon pour l’enquête, le transfert vers Sacré-Cœur a été retardé, affirme l’avocat. On se pose de sérieuses questions. Pourquoi l’état de santé de ma cliente a-t-il été minimisé tout au long du processus?»
Le père de Caroline Gauvin, Michel Gauvin, porte le dossier à bout de bras et se bat pour ce qu’il considère être juste. Il a entamé les démarches judiciaires au nom de sa fille et espère que la lumière sera faite sur cette histoire.
De son côté, le Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Ouest a préféré ne pas se prononcer sur le dossier, étant donné qu’il ne détient pas l’information concernant une plainte au Collège des médecins.
La plainte questionne les priorités du médecin: «promouvoir la santé de sa patiente ou l’enquête criminelle des policiers»?
Cinq policiers sous enquête
Comme l’a rapporté Radio-Canada le 26 juin, les cinq policiers de la Régie intermunicipale de police Roussillon chargés de l’enquête sur l’accident de Caroline Gauvin font l’objet d’une enquête de la Sûreté du Québec. La résidente de Saint-Rémi a déposé une plainte au ministère de la Sécurité publique qui a demandé à la SQ de prendre en charge l’enquête par souci de transparence, a indiqué le média national. La plaignante estime que l’enquête policière qui a suivi est jugée «incomplète, basée sur des informations erronées et des techniques d’enquête illégales», a indiqué Radio-Canada.
La SQ a confirmé au Reflet que c’est la division des normes professionnelles qui enquête. Cette branche de la SQ a le pouvoir de déposer des accusations criminelles au même titre que le Directeur des poursuites criminelles et pénales.
De son côté, la direction de la Régie intermunicipale de police Roussillon a indiqué «qu’elle ne désirait pas émettre de commentaires pour l’instant, puisqu’une enquête de la Sûreté du Québec est en cours.»