«Il faut développer un regard critique sur la santé mentale» -Intervenante à l’Avant-garde

le mercredi 8 mai 2019

La santé mentale est de plus en plus discuté, mais toujours stigmatisé, selon Halleema Raschid, coordonnatrice et intervenante à l’organisme Avant-garde à La Prairie. Elle croit qu’il y a encore beaucoup d’éducation populaire à faire à ce sujet.
Mme Raschid explique qu’elle ne travaille pas avec le diagnostic si un membre se présente à l’organisme.
«Si tu arrives ici en me disant que tu es schizophrène, je vais tasser ça pour savoir qui tu es toi, dit-elle. Quelle est ton expérience? Qu’est-ce qui se passe dans ta vie? Qu’est-ce qui fait que tu te retrouves là aujourd’hui?»
Elle donne en exemple le deuil pendant lequel certaines personnes sont parfois médicamentées. À son avis, la souffrance est normale pendant une période d’environ un à trois mois. Il est possible que quelqu’un soit en dépression, soutient Mme Raschid, «mais il faut comprendre et regarder les alternatives à la médication. On ne dit pas que ce n’est pas bon, mais il y a parfois d’autres solutions».
Selon elle, les médecins n’ont pas toujours le temps d’écouter la personne pour bien comprendre.
«Nous on l’a, on le prend le temps», affirme-t-elle.
Néanmoins, la coordonnatrice à l’Avant-garde soulève le manque de ressources en santé mentale. Cela crée des barrières lorsque les gens veulent aller chercher de l’aide, croit-elle.
Préjugés
Selon Mme Raschid, la stigmatisation vient entre autres de tragédies médiatisées.
«Quand il y a des drames comme celui de Guy Turcotte, c’est dans la nature humaine de chercher une explication et une compréhension. On pointe souvent du doigt les problèmes de santé mentale», soulève-t-elle.
Elle ajoute aussi que les gens se cherchent aussi des diagnostics depuis qu’on parle beaucoup plus de dépression et d’anxiété, par exemple.
«Nous, on essaie de parler d’émotions et de normaliser ça un peu plus. Ces problèmes partent souvent d’une quête de sens», soutient Mme Raschid.
Elle insiste sur le fait que la santé mentale ne touche pas des classes sociales ni des tranches d’âge en particulier, mais que les réactions face à la détresse sont différentes selon ses facteurs.
À propos de l’Avant-garde 
L’Avant-garde est un organisme communautaire qui offre des ateliers, des groupes d’entraide et du soutien psychologique.
Halleema Raschid déplore que l’Avant-garde ne soit pas plus connu dans la région.
«Il y a une femme de La Prairie qui nous a découverts récemment après avoir enduré des années de souffrance. Elle m’a dit que si elle nous avait connus avant, les choses auraient été différentes pour elle», affirme Mme Raschid.
Il y a peu de rencontres individuelles mis à part à l’accueil d’un membre. Aucun critère n’est exigé pour être pris en charge à l’Avant-garde.
Chiffres
Halleema Raschid croit que c’est une bonne chose de faire connaître les statistiques alarmantes faisant état de la situation au public. Le Mouvement santé mentale Québec dénote entre autres qu’un élève sur trois vit de la violence au secondaire, qu’un universitaire sur deux ressentira des symptômes dépressifs en cours d’année et qu’un employé sur quatre dit éprouver de la détresse psychologique.
«Ça sert de levier. Ça aide la communauté à se mobiliser et à prendre conscience du problème», selon l’intervenante.