Interdire les saveurs de vapotage : «Un coup d’épée dans l’eau», dit un commerçant

le vendredi 21 avril 2023

Les réactions sont nombreuses depuis l’annonce du ministre de la Santé Christian Dubé le 19 avril à l’effet que le gouvernement interdira les saveurs de vapoteuse. Les propriétaires de boutiques spécialisées en vapotage dans la région sont tous d’avis que le projet de loi qui sera déposé ne s’attaque pas au bon enjeu.   

«Ça n’a pas bon de sens. On veut protéger les jeunes dans la législation et on est d’accord avec ça, mais leur porte d’entrée ce sont les petits dépanneurs, le Web et le marché noir», réagit d’emblée Daniel Marien, propriétaire des boutiques La Vape Shop, dont une succursale se trouve à Candiac.

Celui qui est également directeur fondateur de l’Association des représentants de l’industrie du vapotage ajoute que le projet de loi rate sa cible en pénalisant plutôt «Thérèse qui a fumé durant 35 ans et qui n’a pas touché une cigarette en vapotant une saveur de bleuet».

Même son de cloche du côté de la boutique Vape Dépôt à Sainte-Catherine. Keppler Merone observe le même genre de clientèle.  

«Ce matin, un monsieur m’a dit qu’il avait arrêté la cigarette après 35 ans avec la vapoteuse. Il va devoir tout arrêter du jour au lendemain, la saveur de tabac restera autorisée, mais il a lâché le tabac et ne veut pas retrouver ce goût-là», relate-t-il. 

Dans le commerce où il travaille, les liquides ou vapoteuses avec des saveurs représentent environ 80% des ventes, tout comme dans les boutiques La Vape Shop. 

Pour Thomas Dionne, notamment propriétaire des succursales Popavape à La Prairie et Delson, la mesure gouvernementale est inquiétante. 

«Nous sommes beaucoup de jeunes entrepreneurs que ça va affecter. Je suis tout à fait d’accord avec le principe d’éliminer les saveurs, mais dans les dépanneurs, comme en Ontario», affirme-t-il. 

Les boutiques spécialisées reçoivent fréquemment des visites d’inspecteurs et sont déjà surveillées, remarque M. Dionne. De plus, ses clients sont des adultes informés, dit-il, puisque les mineurs n’ont tout simplement pas accès aux commerces de vapotage. 

Fermetures

Il y a un risque que les entreprises ferment, admet M. Merone. 

«On a 90 jours pour revendre ce qu’on a. Je pense qu’il va falloir tout renvoyer ce qui reste, essuyer les pertes et par la suite, on va voir. On espère que ce sera renversé, parce que beaucoup vont faire faillite», déplore-t-il.
Aux yeux de M. Dionne, il y a une possibilité que le projet de loi ne passe pas tel quel. Il soutient que l’industrie va se battre.

M. Marien a peu d’espoir que le gouvernement provincial recule, mais croit qu’il pourrait «mettre un peu d’eau dans son vin». 

Ce dernier est également d’avis qu’il y a une certaine injustice quant aux saveurs qui sont offertes dans le cannabis des SQDC ou dans l’alcool à la SAQ. 

«C’était un coup de barre au visage de voir plus tôt cette semaine, l’annonce d’une compagnie de cannabis qui s’associe à la SQDC avec un pot à l’abricot et à la crème. On nous décrit comme le démon, parce que nous n’appartenons pas au gouvernement», avance-t-il.  

En tant que propriétaire d’une chaîne comptant une quarantaine de magasins qui développe ses liquides de vapoteuse au Québec, il s’attend à devoir réfléchir quant à certains emplacements qui sont moins rentables. M. Marien ne croit toutefois pas qu’il aura à mettre la clé dans la porte de tous ses commerces. 

Règlement

Le gouvernement provincial adoptera sous peu un règlement interdisant un arôme autre que le tabac dans les produits de vapotage, sous la recommandation d’un groupe d’experts de la santé publique afin de remédier à la popularité des vapoteuses chez les jeunes, a affirmé le ministre de la Santé Christian Dubé à plusieurs médias.

Les changements à la Loi concernant la lutte contre le tabagisme limiteront également à 20 mg/ml la concentration en nicotine des produits de vapotage, restreindront la capacité des réservoirs et capsules à 2 ml et à 30 ml pour les contenants de recharge, puis interdiront les produits visuellement attrayants pour les jeunes.