La pandémie a accru le problème des lapins domestiques errants, alors que de nombreux propriétaires ont abandonné leur animal, pensant à tort qu’il pouvait survivre dehors.
Saint-Amable, 29 décembre. Il est 3h du matin. Émilie Champagne, une bénévole de Sauvetage lapins errants (SLE), capture le 100e et dernier lapin de 2021. Un chiffre rond qui marque la plus grosse année pour l’organisme fondé il y a 3 ans, le seul du genre dans la province. En 2020, ce chiffre était de 59.
La pandémie n’est pas la seule cause de cette recrudescence, selon Carolane Besner, cofondatrice de l’organisme dont la mission est de capturer et de porter assistance aux lapins domestiques dans la nature. S’ajoute le nombre d’adoptions et d’abandons ainsi qu’une hausse de signalements ces deux dernières années.
«Les gens sont plus à la maison avec le télétravail. Ils remarquent davantage les animaux autour de chez eux», explique-t-elle.
Bien que SLE intervienne dans toute la partie sud du Québec, ses opérations sont principalement concentrées en Montérégie, de Salaberry-de-Valleyfield à Saint-Hyacinthe.
On en trouve partout. Certaines villes voient même apparaître des colonies – soit des regroupements de plus de 10 en un même lieu. C’est le cas de Saint-Hubert qui compte un regroupement de 20 lapins. À Châteauguay, avant le passage de SLE, une colonie d’une cinquantaine de lapins domestiques existait.
«La plupart des gens ne veulent pas qu’on aille chercher le lapin parce qu’ils trouvent ça cute. Les enfants vont le flatter, le nourrir, mais le lapin est en danger.»
-Carolane Besner, cofondatrice de Sauvetage lapins errants
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Les bénévoles utilisent parfois des clôtures pour faciliter la capture des lapins domestiques errants. (Photo: Gracieuseté – Émilie Champagne)
Opération de sauvetage
Les opérations de sauvetage commencent par un signalement citoyen, la plupart du temps via la page Facebook de l’organisme. Des bénévoles sont envoyés pour cerner la zone où vit le lapin.
«L’hiver, on regarde si on voit des traces et l’été, on fait du porte-à-porte», précise Mme Besner.
Incapable de se creuser un terrier, le lapin domestique loge souvent sous un cabanon ou près des sorties de chauffage des maisons. Il a tendance à rester dans la même petite zone autour de son nouveau logis. Ce qui oblige souvent les bénévoles à convaincre les résidents des terrains concernés de les laisser le capturer, avec des cages et des enclos. Une fois le sauvetage effectué, le lapin est soigné et remis à un refuge spécialisé.
Des bêtes d’intérieur
Le lapin domestique est incapable de s’adapter à l’hiver, ce qui justifie une intervention rapide à longueur d’année. Il est incapable de creuser sous la neige pour manger et se nourrit donc avec ce qui est à sa portée, tels de l’écorce, du cèdre ou des graines de mangeoire d’oiseaux.
«Ces trois aliments sont cependant toxiques pour lui», prévient la spécialiste.
La plupart des lapins capturés sont aux prises avec des maladies (engelures, pododermatite, vers intestinaux, etc.) et 98% des femelles sont enceintes lorsqu’elles sont capturées, selon Mme Besner.
L’adoption responsable et plus de ressources
L’organisme se bute à un manque criant de ressources, de familles d’accueil, de vétérinaires et de refuges qui peuvent accepter ces lapins, un problème exacerbé par la pénurie de main-d’œuvre. Mme Besner l’exprime ainsi: «En 2021, on a sauvé 100 [lapins], mais si on avait eu plus de places et plus de ressources, ç’aurait été 300».
Pour Sauvetage lapins errants, la solution durable passe par l’adoption responsable. «Si les gens s’informaient avant d’adopter un lapin, on aurait beaucoup moins d’abandons à l’extérieur et si les gens adoptaient en refuge, un autre problème serait réglé: celui de la stérilisation», dit-elle.
Autre ennui: les refuges conventionnels ne prennent pas les lapins domestiques, puisqu’ils sont considérés comme des animaux exotiques. SLE doit donc faire affaire avec des SPCA, dont celle de Roussillon à Delson, certains refuges privés et des vétérinaires spécialisés pour examiner et stériliser les lapins.
La petite équipe de 12 bénévoles de SLE se concentre pour le moment sur la Rive-Sud mais grossit «très rapidement, puisque la demande est là», selon sa cofondatrice.
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Le lapin domestique est incapable de creuser sous la neige pour se nourrir. (Photo: Gracieuseté – Émilie Champagne)
Comment identifier un lapin errant
Les lapins domestiques et sauvages sont assez différents pour être facilement identifiables, explique Carole Besner, de l’organisme Sauvetage lapins errants (SLE). Le lapin sauvage, de couleur fauve, a un plus petit gabarit, de petites oreilles, une allure élancée, le dessous de la queue blanche et son poil devient blanc l’hiver. Il est nerveux et on ne peut s’en approcher. Le lapin domestique, quant à lui, est de toutes les couleurs, a de grandes oreilles, est plus gros et craint moins les humains.