Les clés de la conduite hivernale selon un expert

le mercredi 11 mars 2020

Les tempêtes pendant l’hiver ne rendent pas la conduite automobile facile. Carambolages, accidents dus à la mauvaise visibilité; comment les éviter? Le spécialiste Bertrand Godin, instructeur en conduite de véhicules d’urgence à l’École nationale de police du Québec expose quelques notions pour être plus sécuritaire.

«La conduite dépend toujours de notre sens de l’observation, dit Bertrand Godin d’entrée de jeu, lors d’un entretien avec Le Soleil de Châteauguay. Ce n’est pas juste une question de règlementation, c’est de connaître comment une voiture va se comporter. »

Le pilote de course professionnel considère que d’acquérir cinq années d’expérience à circuler sur la route sont nécessaires avant d’avoir vu toutes les situations possibles. Dans le cadre de ses fonctions d’enseignant à l’école de police, il a constaté que les situations extrêmes ne sont pas enseignées dans les instituts de conduite pour avoir formé plus de 8 000 aspirants policiers au cours de la dernière décennie.

La perte de contrôle sur une chaussée glacée n’est pas une question de km/h, selon lui.

« On peut avoir une situation où le taux d’adhérence est de zéro. Vous avez beau être le meilleur conducteur. Quand vous tournez le volant et que vous freinez et qu’il n’y a rien qui se passe; votre talent vaut zéro, donc c’est vraiment l’anticipation des capacités de la voiture sur la chaussée. »

Est-ce qu’un système de frein antiblocage (ABS) est un équipement de sécurité primordial sur une voiture selon lui ?

« C’est sû que oui parce que ce n’est pas quelque chose qui est montré aux gens; le freinage d’urgence. […] Un bon freineur va être meilleur qu’un système ABS. […] À cause de ce système, ce n’est plus obligatoire de l’enseigner (freinage d’urgence). […] Je vois beaucoup de gens qui auraient pu éviter un accident, mais ne savait pas que leur voiture était capable de faire une manœuvre. […] Le gros problème du mur blanc, c’est qu’il faut être capable de l’anticiper et c’est ce qui est le plus difficile », laisse-t-il entendre.

Des ingrédients pour une bonne conduite

-Faire un test de freinage. « Certains conducteurs ne font pas de test de freinage. Ils voient que la condition de la route se détériore et là ils prennent pour acquis qu’il y a de l’adhérence et quand ils arrivent pour freiner, il se rendent compte qu’il est trop tard », insiste Bertrand Godin.

-Avoir conscience de ce que la voiture peut faire.

-L’expert soulève la technique de conduite SMITH. Elle comprend cinq comportements à adopter; regarder au loin, agrandir son champ visuel, garder les yeux en mouvement, s’assurer d’être vu, se ménager une issue. « Les gens ont tendance à ne pas balayer assez large (avec les yeux), donc on perd des détails importants. […] Parfois, on va se tasser de quelques centimètres d’un côté ou de l’autre et on va augmenter considérablement la performance de freinage d’une voiture. Compte tenu du fait qu’on a toujours montré aux gens à conduire entre deux lignes, les gens vont souvent mettre les roues directement sur de la glace et perdent énormément d’efficacité », poursuit-il.

Et la vitesse?

La limite de vitesse de 100 km/h sur les autoroutes devrait-elle être augmentée? « Sur les autoroutes ça pourrait être fait, mais dans certaines conditions lorsqu’il fait beau l’été. […] La limite de vitesse, c’est juste un chiffre. Ce n’est pas garant de sécurité. On apprend trop à gérer des panneaux et malheureusement pas à gérer les êtres humains sur le chemin. […] Le jeu visuel qu’on doit avoir quand on conduit doit être un balayage loin pour anticiper les dangers », fait-il valoir.

Un VUS plus sécuritaire?

Le VUS (véhicule utilitaire sport) est efficace mais à quelques nuances près. « C’est un véhicule qui est assez lourd. Il va avoir une bonne décélération et une bonne motricité quand on accélère si bien que ça donne souvent un faux sentiment d’adhérence. Quand ils (conducteurs) arrivent au freinage, un VUS n’a pas plus d’adhérence qu’une voiture normale sur de la glace. Les gens ont cette mauvaise perception-là, rend compte M. Godin. Il y a deux choses qui arrivent sur la route. Il y a les gens qui surévaluent la capacité de leur voiture dans son environnement et il y en a d’autres qui la sous évalue. […] Il y a encore beaucoup de choses à montrer en conduite pour arriver à avoir un niveau de conduite acceptable dans des conditions extrêmes. »