La présidente du Syndicat de l’enseignement de la région de Vaudreuil, Véronique Lefebvre a accepté de transmettre ses commentaires sur le plan de rattrapage présenté plus tôt cette semaine par le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville.
« Je pense que ce plan est d’abord politique et que le ministre ne pouvait surtout pas se mettre à dos le personnel en récupérant les journées pédagogiques pour en faire des journées de classe, en obligeant le personnel à travailler à la relâche scolaire et en rendant ce plan obligatoire. Cela dit, il est intéressant, puisqu’il permet aux équipes-écoles de s’adapter aux besoins de leurs élèves », lance-t-elle, avant d’ajouter un bémol. « Je déplore que le ministre ne nous ait pas consultés. C’est d’ailleurs un problème récurrent avec ce gouvernement qui ne fait pas la distinction entre consulter et informer », indique Véronique Lefebvre.
Pour elle, certains enseignants saluent le déplacement de la fin de la deuxième étape, d’autres sont satisfaits que la pondération des examens du ministère soit revue à la baisse, puis certains croient qu’il aurait été préférable de ne s’attarder qu’aux savoirs essentiels comme ce fut le cas lors de la pandémie.
Trouver le personnel
Les montants déployés permettront d’offrir des services importants aux élèves qui en ont besoin, à condition qu’il y ait suffisamment de personnel. « Ça, ce n’est pas certain, et qu’en est-il des locaux disponibles ? Probablement que le personnel qui répondra présent le fera pour rattraper le salaire perdu. D’autres refuseront, car les journées de travail sont remplies et que beaucoup d’élèves ont besoin de temps pour socialiser à la période de dîner avec leurs amis et qu’à la fin des classes, ils en ont assez. Notez que c’est le salaire perdu des grévistes qui est investi. Cela en dit long sur les priorités gouvernementales », analyse la présidente syndicale.
Elle raconte ce qu’une enseignante, Claudine, lui disait à l’issue de la conférence de presse du ministre Drainville. « Je trouve cela frustrant et insultant que le gouvernement injecte 300 millions alors que la grève aurait pu être évitée si celui-ci avait négocié pour de vrai dès le début et qu’il n’avait pas laissé traîner la négociation jusqu’à la dernière seconde. »
Une somme récurrente ?
Le montant de 223 millions de dollars correspond au tiers du budget consacré pour l’année aux services aux élèves, au tutorat et à l’ajout de ressources liées aux élèves en situation de handicap ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA). « Si le gouvernement priorisait l’éducation, cette somme serait récurrente et permettrait d’offrir le service aux élèves. Il ne faut pas être dupe et croire qu’un plan de rattrapage à la suite de la grève sera la solution pour rattraper les besoins criants des élèves qui n’ont pas nécessairement le service dont ils ont besoin puisque les ressources financières sont insuffisantes depuis longtemps », avance Véronique Lefebvre.
Marie-Claude Nolin, orthopédagogue, abonde dans le même sens. « Nous le savons, ce ne sont pas ces journées de grève qui ont nui aux élèves, ce sont les décennies de compressions budgétaires. C’est un plan de rattrapage politique assez habile qui achète la paix avec bien du monde. Je ne crois pas à l’impact réel des interventions. Selon moi, si on ne priorise pas les contenus à enseigner le rattrapage dont il parle est peu probable à court terme. »
En terminant, la présidente Lefebvre indique avoir des inquiétudes en ce qui concerne le volontariat, qui doit être réel et non imposé par les directions au personnel enseignant. « Car certains ont de la difficulté à dire non, la cour est pleine. Quelques directions savent comment convaincre le personnel et certaines personnes peuvent se sentir coupables de ne pas accepter de travailler des heures supplémentaires. Le personnel enseignant sera en mode accéléré et prendra les bouchées doubles en classe. Je vous rappelle qu’une de leurs demandes dans cette ronde de négociation est de diminuer la tâche et non de l’augmenter », conclut-elle.