Pompier en choc après une intervention : La Prairie conteste le paiement des prestations

le vendredi 23 juin 2023

Estimant qu’elle a été imputée injustement des prestations liées à la lésion professionnelle d’un pompier, La Prairie a contesté en cour le plein paiement des sommes. Elle a eu gain de cause dans le dossier de cet employé qui a subi un choc après être intervenu sur un sauvetage nautique auprès de membres de sa famille. 

La décision a été rendue devant la juge Isabelle St-Jean au tribunal administratif du travail, constate-t-on dans le jugement final rendu public le 1er mai. 

Celui-ci relate que «le 1er septembre 2019, un lieutenant incendie à l’emploi de la Ville de La Prairie a subi un trouble d’adaptation avec humeur anxiodépressive, après avoir répondu à un appel d’urgence en sécurité nautique impliquant l’embarcation de ses parents et la disparition d’un ami proche de sa famille dans les eaux du fleuve». 

Le travailleur a expliqué un mois plus tard à un agent de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) qu’en arrivant sur les lieux, ses parents et la conjointe de l’ami proche se trouvaient toujours sur le bateau. Il a demandé à un voisin de rester avec eux en attendant la Sûreté du Québec et la garde côtière, mais sachant qu’il y aurait un délai, il a entrepris les recherches. 

Un corps a été retrouvé, mais pas celui de l’homme disparu. 

«Au moment de cette découverte, le travailleur affirme qu’il subit un choc, que la pression et l’adrénaline lâchent d’un coup. Il réussit tout de même à participer au repêchage du corps et à terminer le processus habituel, mais il est retiré de l’enquête dès le retour sur le rivage», peut-on lire dans le jugement.

Le pompier a aussi affirmé qu’il a vécu plusieurs cas difficiles en 19 ans de carrière. Le choc qu’il a subi était lié au fait qu’il connaissait la victime, même si ce n’est pas le corps de son ami qu’il a trouvé. 

«Ainsi, n’eût été la relation du travailleur avec le tiers, il n’aurait pas subi un accident du travail le 1er  septembre 2019», a expliqué la juge. 

« Arrivé sur les lieux, j’ai constaté que l’embarcation impliquait mes parents et des membres de ma famille et que la personne recherchée était un proche. J’ai débuté les recherches avec mon équipe, mais j’ai subi un choc après l’intervention.» 
-Pompier de La Prairie

Exception 

La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles stipule que l’employeur doit couvrir le montant des prestations dues dans le cas d’un accident survenu à un travailleur alors qu’il était à son emploi, est-il détaillé dans le jugement. 

Cependant, des exceptions s’appliquent dans le cadre de la Loi, notamment si l’accident de travail est attribuable à un tiers. C’est en s’appuyant sur cet argumentaire que la Municipalité a contesté. 

Elle s’est d’abord adressée à la CNESST pour un transfert du montant à l’ensemble des employeurs du Québec qui cotisent à la Commission. La demande a été refusée, puis a fait l’objet d’une révision administrative avant de se rendre devant le Tribunal.

«L’employeur invoque que l’accident du travail du 1er septembre 2019 a été causé par l’ami proche de la famille du travailleur, qui devait être secouru par son intervention. Il ne fait aucun doute que cet ami proche de la famille du travailleur est un tiers», estime la juge. 

Elle ajoute «que la personne devant être secourue ait un lien avec le travailleur lui-même n’en fait pas moins un tiers. Malgré cette relation, elle n’en entretient toutefois aucune avec l’employeur».

Le Tribunal considère également que l’individu en détresse a également contribué à l’accident de façon significative.

Satisfaite

«Les coûts pour la Ville sont ainsi pratiquement nuls, car ils sont imputés à l’ensemble des employeurs du Québec, soit ceux qui cotisent à la CNESST», affirme Dominique Beaumont, directrice des communications à La Prairie. 
Elle fait savoir que la Municipalité est satisfaite de la décision du tribunal.

Par ailleurs, Mme Beaumont précise que la contestation concernait uniquement le partage des coûts qu’elle ne précise pas, non pas l’admissibilité de la lésion subie par le travailleur, qui a été en arrêt de travail durant plusieurs mois.