Pour en finir avec les livres à colorier

le lundi 21 février 2022

Depuis 1968, le jardin d’enfants la Soleillerie à Saint-Lambert a mis en place une approche particulière mais désormais réputée: le développement de l’enfant par l’art visuel. En juin 2021, trois éducatrices ont publié les secrets du succès de l’établissement dans un livre intitulé Les deux mains dans les arts. Le Courrier du Sud s’est entretenu avec deux des autrices, Danielle Lenoir et Manon Saint-Laurent.

Q Qu’est-ce que Les deux mains dans les arts ?

Le livre est le reflet de ce qu’on fait avec les arts plastiques à la Soleillerie. C’est un projet qui est basé sur l’observation faite au cours des années sur l’expression des enfants par les arts. Ce sont plusieurs années de recherche en psychologie et en développement de l’enfant qui forment la base théorique de notre approche. C’est un courant de pensée, une connaissance avec les années sur le développement de l’enfant, autant au niveau de la pédagogie par le jeu que par l’analyse qu’on a et les études qui ont été faites sur l’importance des arts visuels, des arts plastiques dans son développement.

Q En quoi consiste l’approche de la Soleillerie ?

L’approche n’est pas axée sur la production de quelque chose de précis, c’est plutôt axé sur l’expression de l’enfant par lui-même. Il n’y a pas de livre à colorier, pas de moule pour la pâte à modeler, pas de peinture à numéros, pas de bricolage structuré. Il y a des consignes à suivre pour l’utilisation du matériel mais le produit fini reste celui de l’enfant. Lorsque que l’on ne structure pas, c’est ça le chemin vers l’émotion. Ce qu’on veut aller chercher chez l’enfant, c’est vraiment tout son monde affectif et tout son monde émotif. On laisse l’enfant créer. C’est un peu un cadeau pour nous. On reçoit le dessin, on l’accueille et on écoute ce que l’enfant a à nous dire autour de ça; ce qu’il vit à la maison, ses stress, ses belles affaires, ses choses un peu plus difficiles.

Q  Dans le livre, vous abordez l’idée de ne pas structurer le produit fini chez l’enfant. Comment ça fonctionne ?

Dans beaucoup de garderies, c’est encore plein de petits produits finis. Par exemple, on décide de faire des pingouins et ils sont tous pareils! Les enfants collent les petits yeux préfabriqués que l’éducatrice a faits, ils collent les ailes que l’éducatrice a découpées. Ça ne devrait plus exister au Québec. On devrait permettre aux enfants d’avoir plein de matériel devant eux. Ça permet notamment de voir les différences entre les enfants dans leurs créations. Cette approche-là est aussi beaucoup plus facile à mettre en place pour les professeurs et les éducatrices. On peut cependant encadrer l’enfant en apportant un thème, en apportant des stimulations, en l’informant d’un sujet. À ce moment-là, on nourrit l’intellect de l’enfant, qui va s’en servir pour s’exprimer.

Q À qui s’adresse le livre ?

On l’a écrit autant pour les gens dans le milieu de la petite enfance que pour un parent. Les attitudes, les interventions, l’organisation des activités comme telles, que ce soit par un parent, une éducatrice ou une enseignante, il reste que c’est la même réalité.

Q Est-ce que ça fonctionne avec tous les tout-petits ?

Oui, c’est universel et c’est le reflet de l’humanité au complet. L’humain a appris à écrire, à prendre des phonèmes de notre langue, les traduire par un signe. Mais avant d’être capable d’écrire le mot «maison», tu as été capable d’en dessiner une!

«C’est le plus beau cadeau qu’on peut faire à nos tout-petits, de vivre cette créativité-là.»

-Danielle Lenoir, fondatrice de la Soleillerie