Travaux au pont-tunnel : changer d’emploi, opter pour le télétravail et avoir des plans de rechange

le jeudi 3 novembre 2022

Devant la «catastrophe annoncée» de la fermeture de trois voies du pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine en vigueur depuis le 31 octobre, certains ont opéré des changements drastiques dans leur vie. D’autres attendent de bien tester l’eau avant de s’adapter. Voici trois témoignages recueillis aux premiers jours de ce chantier de trois ans. 

Nouvel emploi

Il y a trois semaines, Mathieu Yelle a quitté son emploi de représentant chez un distributeur de produits électriques à Anjou. 

Cause première de ce changement d’emploi: le chantier du pont-tunnel. Il n’était pas question pour celui qui est originaire de Saint-Constant d’en «tester» les effets sur la circulation avant de prendre une telle décision.

«J’ai surfé le plus longtemps possible! Dès janvier, j’avais averti mon patron que je n’allais pas rester, signifie-t-il. C’était rendu que j’étais pressé de retourner chez nous en après-midi pour éviter le trafic, et je n’allais plus voir des clients à Saint-Léonard.»

Ce trajet pouvait lui prendre jusqu’à deux heures certaines journées. «Quand tu es pris dans le trafic, bumper à bumper, disons que tu arrives plus fâché à la maison.»

Le résident de Chambly a été embauché chez Lumen, à Longueuil, où il occupe un poste similaire. M. Yelle n’a donc aucun regret. 

«C’est le jour et la nuit!, constate-t-il. Il y a des fois des ralentissements, mais de savoir que je reste sur la Rive-Sud et que je peux trouver une autre option s’il y a du trafic, ça fait toute la différence.»

Se rendre au travail, près du boulevard Industriel, lui prend maintenant 45 minutes. 

 5h30 au bureau 

Jessica Ross est directrice de la boîte créative chez Gravité Média à Candiac. Elle habite à l’est de Rivière-des-Prairies. Depuis mai, elle arrive au travail à 5h30 et quitte à 13h lors des deux journées par semaine où elle doit se rendre au bureau. Ce, pour éviter le trafic des heures de pointe, qui peut se traduire par un parcours d’une durée allant parfois jusqu’à 1h55 au retour.

Constatant une densification du trafic depuis septembre, elle redoutait la fermeture de la moitié des voies du pont-tunnel. Ce chantier n’a pas entraîné de changement à son horaire, du moins, pas pour l’instant.

Prévoyant se rendre au bureau mercredi, Mme Ross s’est ravisée lorsqu’elle a jeté un œil à Google Maps, à 4h55.

«Ma mâchoire m’a lâché quand j’ai vu où le rouge était déjà rendu sur la carte, aussi tôt!» 

-Jessica Ross

«Le trafic était bien jammé sur l’autoroute 25, en haut de Sherbrooke! Sur Waze, ça me disait que ça prendrait 50 minutes, mais à voir où c’était arrêté, c’était impossible. À chaque minute, ça devenait toujours plus dense.»

Son GPS identifiait le pont Samuel-De Champlain comme la voie la plus rapide. 

Deux jours plus tôt, la route de la maison vers le bureau, puis du bureau à la maison, s’était relativement bien déroulée: 50 minutes à l’aller, 45 minutes au retour.

Malgré tout, déménager sur la Rive-Sud n’est pas une option pour elle, advenant que la congestion ne s’aggrave. Sa famille et ses amis habitent Montréal et la Rive-Nord.

Irait-elle jusqu’à changer d’emploi?

«Je suis jeune et je m’imagine prendre ma retraite chez Gravité. Je ne voudrais pas quitter ma job à cause d’un tunnel…» confie-t-elle.

Sa gestionnaire est très ouverte à trouver des solutions, dit-elle. 

Judith Cailhier, vice-présidente exécutive et division marketing, estime que dans ce contexte, les employeurs doivent être flexibles. «Il n’y a pas plein de solutions, mais la flexibilité en est certainement une», exprime-t-elle.

Plan C : l’hôtel

Tony Bolduc, résident de Mercier, travaille comme camionneur pour le ministère des Transports du Québec à Anjou. Il emprunte pour ce faire le pont-tunnel – la voie la plus rapide pour ce trajet – jusqu’à maintenant du moins. Il ne croit pas que ses habitudes seront trop bousculées par ce nouveau chantier, mais s’adaptera au besoin. Il a un plan B et un plan C. 

«Dans le cas où la circulation serait trop dense pour le tunnel, j’irai plutôt emprunter la 40 ouest pour aller vers le pont Mercier», envisage-t-il.

En cas de tempête durant l’hiver, il se tournerait vers la location d’une chambre d’hôtel près de son lieu de travail «plutôt que de passer des heures sur la route, me privant ainsi de sommeil, avance-t-il. C’est la mesure la plus drastique dans mon plan pour éviter le trafic.»

M. Bolduc rappelle que la configuration du tunnel en direction nord a déjà été modifiée depuis quelques semaines, laissant déjà deux voies disponibles. 

«Je n’ai pas remarqué de différence depuis cet aménagement. Le trafic n’est ni plus dense ni moins dense qu’avant. Et c’est très fluide malgré tout», a-t-il commenté, le 1er novembre. 

En direction sud, il fera le test au cours de la semaine prochaine, alors qu’il est actuellement en congé. Il se dit chanceux de bénéficier d’un horaire atypique, qui lui évite les heures de pointe.