Un Laprairien installé aux États-Unis commente les enjeux du pays

le vendredi 16 septembre 2022

Au cœur d’un pays où les violences armées sont en hausses et où le droit à l’avortement est restreint, Simon Rousseau raconte son quotidien aux États-Unis où habite depuis 11 ans.

Établi en Caroline du Nord, le biochimiste est désormais habitué de voir des gens porter leur arme librement, mais il ne cache pas qu’il a vécu un choc lorsqu’il est arrivé au pays en septembre 2011.

«C’est sû que nous ne sommes pas habitués au Québec, mais ici, tu t’y fais à la longue», indique le natif de La Prairie.

L’homme de 31 ans a vécu ses dix premières années au Texas et a ensuite déménagé en Caroline du Nord à l’été 2021.

«En Caroline, je suis nouveau, donc je ne connais pas leur position [sur les armes à feu], explique-t-il. Par contre, le Texas a toujours été ouvert à ça.»

Il raconte que le port des armes à feu est plus permissif dans cet État depuis quelques années, alors que le gouverneur du Texas, Greg Abbott, a retiré plusieurs restrictions pour obtenir une arme, notamment l’absence de vérification des antécédents.

«Si tu as un permis, tu peux maintenant te déplacer sur le campus et dans les classes [avec une arme scellé à ta ceinture]. C’est sû que ça n’a pas été bien reçu, surtout des professeurs. Tu ne sais jamais ce que sera la réaction d’un élève si tu le fais échouer, fait remarquer le biochimiste. Surtout pour certains, ils pensent que les études sont l’affaire la plus importante de leur vie.»

Il affirme avoir été chanceux de ne pas être témoin de conflit de ce genre lorsqu’il étudiait à Texas A&M University. Néanmoins, il ne pense pas que les États-Unis règleraient le problème des armes à feu en légiférant plus sévèrement. Puisque plusieurs armes sont déjà en circulation, il croit que les gens auraient de la faciliter à s’en procurer une illégalement.

Dans les quartiers les plus criminalisés, dont celui qu’il habite dans la ville de Durham en Caroline du Nord, les habitants sont pris dans un cercle vicieux.

«La ville a un haut taux de criminalité, surtout au niveau des gangs de rues, précise-t-il. Ça force des résidents à se procurer des armes, puisque les autres alentour en ont.»

Questionné à savoir s’il craint de vivre dans ce quartier, M. Rousseau affirme avoir toujours une petite inquiétude, mais confie qu’il s’est habitué.

«C’est sû qu’on prend des précautions, mais on n’arrête pas de vivre», conclut-il.

Même si ça ne l’intéresse pas, il ne peut pas de toute façon se procurer une arme, puisqu’il n’est pas citoyen américain.

Avortement

À propos du renversement du jugement Roe v. Wade aux États-Unis, qui donne le pouvoir aux États de légiférer sur le droit à l’avortement, Simon Rousseau croit que l’impact n’est pas le même pour tout le monde.

«Ça cause beaucoup d’inégalité dans l’accès aux services, explique-t-il. Quand tu as les moyens, tu vas pouvoir aller [dans un autre État] pour le faire, alors que ceux qui n’en ont pas n’auront pas le choix d’aller vers des avortements moins sécuritaires.»

En matière d’histoire, il croit que c’est la première fois que la Cour suprême des États-Unis retire un droit à ses citoyens.

«C’est vraiment quelque chose de troublant, puisque ça ouvre la porte à d’autres revirements de jugements, craint-il. C’est de reculer après le travail fort qui a été fait pour protéger les droits des femmes.»

Lorsqu’il a rendu sa décision, le juge à la Cour suprême Clarence Thomas avait évoqué qu’il faudrait revoir les jugements qui autorisent le mariage entre le même sexe, les relations entre mêmes sexes et l’accès aux moyens contraceptifs.

«La minorité religieuse semble être en mesure de passer au-dessus de ce que les gens veulent vraiment», estime-t-il.

Déménagement

Simon Rousseau a déménagé dans l’État du Texas en 2011 après avoir reçu une bourse pour évoluer dans l’équipe de tir à l’arc de Texas A&M University. Il a complété un baccalauréat en biochimie et génétiques et est détenteur d’un doctorat en biochimie.

«Les gens prennent des armes parce qu’ils aiment ça, pas parce qu’ils en ont réellement besoin.»

-Simon Rousseau