Une maladie pas aussi sombre

le lundi 21 septembre 2015

«En général, les personnes atteintes d’Alzheimer ne veulent pas consulter, car elles ont appris à camoufler leurs oublis et, au fil du temps, à croire qu’effectivement elles n’ont pas de problème.»

Marie Jeanne Bellemare a dû composer avec cette maladie aux débuts des années 2000 lorsqu’elle a vu apparaître chez ses parents d’inquiétants troubles de mémoire. Auteure du livre L’Aventure Alzheimer, paru en 2011, elle s’emploie depuis à démystifier et surtout dédramatiser cette maladie.

«C’est une maladie qui fait tellement peur.  Consulter, c’est avouer que sa tête ne fonctionne pas bien, poursuit-elle. On peut dire à tout le monde qu’on a un cancer, un problème cardiaque, mais l’Alzheimer! Ouf! Quelle honte!»

«C’est mon père qui a été atteint en premier alors qu’il avait 80 ans. Il se perdait dans des lieux qu’il connaissait pourtant bien. Par la suite, c’est ma mère qui a été touchée à 83 ans. On ne réalise pas tout de suite les symptômes qui affectent les personnes. Elles font en sorte de cacher leurs pertes de mémoire. Mes parents ont eu ce réflexe», déclare la résidente de Boucherville.

«Mon père me parlait toujours de vieux souvenirs qu’il conservait très bien en mémoire. Il ne pouvait pas, cependant, m’entretenir de ce qu’il avait fait hier», ajoute l’auteure.   

Si elle n’a pas été surprise du diagnostic concernant son père, elle déplore le peu d’information qu’il y avait à l’époque sur l’Alzheimer.

«Les quelques livres qui traitaient alors du sujet indiquaient qu’il fallait faire diversion lorsqu’une personne atteinte était en crise, mais sans plus», affirme-t-elle.  

Deuil

C’est ce constat qui a amené Marie Jeanne Bellemare à prendre la plume quelques années plus tard afin de partager son expérience.

«J’explique les premiers signes de la maladie, comment les personnes atteintes réagissent, ce qu’il faut faire pour les amener à consulter. Je parle aussi du deuil de la relation que les enfants avaient avec leurs parents touchés», poursuit Mme Bellemare.

Dès le début de la maladie de son père, elle a consigné des notes.

«C’était mon journal de bord. Comme tout le monde, j’ai fait des erreurs face à cette situation. Je me disais que si un jour je pouvais faire profiter mon expérience aux autres, je le ferais. Je ne parle pas directement de mes parents. J’ai mis en scène deux personnages, Mme Rose et M. Louis qu’une famille cherche à accompagner», mentionne-t-elle.  

Pour cette dernière, la communication entre proches et personnes atteintes d’Alzheimer demeure présente, mais sous une autre forme.

«Pour ma mère, je n’étais plus sa fille. Elle ne se souvenait plus qu’elle a été mariée. Je ne m’approchais pas d’elle en lui disant « Bonjour, maman! ». Elle me considérait plutôt comme sa sœur. C’est de l’improvisation et l’on doit s’adapter. J’ai vécu ainsi de beaux moments avec elle parce que j’étais devenue sa sœur», témoigne Marie Jeanne Bellemare.

Questionnée à savoir si elle craint un jour que la maladie la frappe aussi, la femme de 69 ans répond: «Peut-être que je suis une personne optimiste, mais un jour ou l’autre il faudra bien mourir de quelque chose. Mourir de l’Alzheimer ou d’un cancer, avons-nous le choix? Non! Alors, vivons!» 

La maladie d’Alzheimer en chiffres

105 600 : Personnes âgées de plus de 65 ans au Québec atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée. La maladie touche davantage les femmes, soit 74 700.

187 500 : Nombre de personnes qui seront touchées au Québec d’ici 2031. Au Canada, on parle de 750 000 personnes.

30 000 : Il s’agit du nombre de familles qui seulement à Montréal doivent composer avec l’Alzheimer.

33 G$ : Coûts directs (médicaux) et indirects (perte de revenus) combinés à la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée.

(Source : Société Alzheimer Montréal)