Une Laprairienne souhaite plus d’inclusion dans sa ville

le jeudi 6 mai 2021

Ramatan Abdel-Maksoud avait 9 ans quand sa famille s’est installée à La Prairie. La femme de 29 ans raconte avoir vécu différentes situations de racisme dans sa municipalité au cours des 20 dernières années et plus récemment. Elle a contacté Le Reflet afin de dénoncer le manque d’inclusion et la méconnaissance d’une partie de la population.

Originaire de l’Égypte, Mme Abdel-Maksoud est de religion musulmane. Vers l’âge de 17 ans, elle a commencé à porter le voile. C’est à ce moment qu’elle a commencé à voir une différence dans la façon dont les gens agissaient avec elle. Ç’a été le cas avec les parents de ses amis d’enfance.

«Ce sont des gens qui m’ont connue toute leur vie, qui savaient qu’on était musulmans. Ce n’était pas quelque chose qu’on cachait. C’était toujours accepté. Mais à la minute où j’ai mis le voile, on dirait que ç’a créé comme une barrière», raconte-t-elle.

Certains ont arrêté de la saluer dans la rue. À l’occasion, des gens portaient sur elle des regards insistants ou lui lançaient des commentaires discriminatoires, relate-t-elle.

«Ça arrive de temps en temps, et ça, c’est quand ils disent quelque chose, laisse-t-elle entendre. Si non, je ressens toujours les jugements. Les gens ont des biais discriminatoires, des idées préconçues sur moi.»

Mme Abdel-Maksoud nuance tout de même: plusieurs sont gentils avec elle.

«Je suis une personne facile d’approche, toujours souriante, soutient-elle. Ça vient aussi de la richesse de notre culture. Ce sont des choses qu’on amène avec nous, mais les gens ne voient pas ça parce qu’ils ont leur propre idée.»
«La diversité, c’est quelque chose de beau, c’est une richesse. On ne doit pas la cacher.»

-Ramatan Abdel-Maksoudr
Au magasin

La plus récente situation de racisme vécue par Mme Abdel-Maksoud remonte au 9 avril, alors qu’elle était dans un commerce au détail de La Prairie avec ses enfants. Elle s’adressait à eux dans leur langue maternelle, l’arabe. Une dame l’a alors interpelée en l’intimant de parler en français.

«Cette fois-là, je n’ai vraiment pas été capable de me taire. Maintenant, avec le masque, on dirait que les gens pensent que c’est comme un ordinateur derrière duquel ils peuvent se cacher, dit celle qui a tenu à s’expliquer avec la dame à l’extérieur du commerce. Je sentais qu’elle regrettait ce qu’elle avait dit, mais qu’elle le croyait quand même.»

Elle souhaite pour ses enfants, tous deux trilingues, un monde dans lequel ils seront acceptés tels qu’ils sont.

«Ils sont parfaits ainsi. Oui, on s’intègre au Québec, mais on ne vient pas ici pour s’assimiler. On ne va pas changer qui on est, nos croyances, nos valeurs», fait-elle valoir.

Le manque d’éducation de la population au sujet de la diversité explique que les préjugés et le racisme subsistent.

«Je sens qu’à La Prairie, une certaine partie de la population n’a jamais eu l’opportunité de vivre la diversité, de rencontrer des gens qui sont différents d’eux, des minorités», note-t-elle.

Le bureau de comté réagit

Ramatan Abdel-Maksoud croit que la Ville devrait organiser des activités de sensibilisation au racisme, puisqu’en tant que citoyenne, elle se sent impuissante. Elle dit avoir tenté de contacter la mairie, sans succès.

Rejointe par Le Reflet, la Ville de La Prairie a refusé de se prononcer sur le sujet, affirmant qu’il s’agit d’un «sujet chaud» et «de compétences provinciales».

Pour sa part, le bureau de comté du député de La Prairie Christian Dubé a insisté sur le fait que «c’est tolérance zéro face aux actions racistes ou discriminatoires».

Il déplore que cette situation ait pris place dans la circonscription et assure que M. Dubé est «très sensible» à ces enjeux.

«Bien qu’il s’agisse de la première situation qui nous est reportée, l’équipe du bureau de comté la prend très au sérieux. Toutes les situations méritent d’être dénoncées. Sans exception», insiste-t-il en rappelant que le gouvernement a déposé un plan d’action sur la lutte au racisme.

Il rappelle que 15 M$ ont été investis dans le milieu de santé «afin d’assurer une sécurisation culturelle».